Nous reproduisons ici un extrait du livre Le chrétien mature de Jamel Attar publié aux Éditions Clé.
Les différents stades de la vie chrétienne
Avant de commencer l’examen de chaque trait du portrait, il importe d’abord de nous arrêter sur les différents stades de la vie chrétienne avant de parvenir à la maturité. Ainsi chacun pourra se rendre compte où il en est sur le chemin vers la maturité. Car il est fondamental de savoir où l’on se trouve si l’on veut faire les pas nécessaires de la croissance et devenir ce chrétien mature. Bien sûr, nous sommes tous conscients qu’un chrétien n’atteint pas la maturité dès le début de sa vie chrétienne. Mais chacun de nous passe par des étapes progressives à partir de la conversion avant de parvenir au dernier stade.
Et c’est grâce à l’apôtre Jean d’abord que nous allons découvrir ces étapes. Voici ce qu’il écrit dans sa première lettre :
12 Je vous écris, petits enfants, parce que vos péchés vous sont pardonnés à cause de son nom. 13 Je vous écris, pères, parce que vous connaissez celui qui est dès le commencement. Je vous écris, jeunes gens, parce que vous avez vaincu le mauvais. Je vous ai écrit, petits enfants, parce que vous connaissez le Père. 14 Je vous ai écrit, pères, parce que vous connaissez celui qui est dès le commencement. Je vous ai écrit, jeunes gens, parce que vous êtes forts, que la parole de Dieu demeure en vous et que vous avez vaincu le mauvais.
1 Jean 2.12-14
Dans ces trois versets, l’apôtre s’adresse à trois catégories de personnes : des petits enfants, des jeunes gens et des pères. Et il le fait deux fois ! Bien sûr, nous comprenons, d’après ce qu’il leur dit, qu’il ne parle pas de l’âge physique de ces personnes, mais qu’il interpelle ces chrétiens d’après leur maturité spirituelle. C’est dans ce sens que John Stott comprend ces versets. Il précise en effet que « les petits-enfants sont ces nouveau-nés en Christ. Les jeunes gens sont les chrétiens plus développés, forts et victorieux dans le combat spirituel ; tandis que les pères possèdent la profondeur et la stabilité du chrétien d’expérience mûre ».
Ces trois groupes de personnes représentent donc trois étapes du développement spirituel. La famille de Dieu se compose en effet de membres de tous âges, c’est-à-dire de membres de maturité spirituelle différente.
Examinons chacun de ces trois âges en retenant bien que chaque âge est déterminant pour atteindre la maturité, puisque nous passons tous obligatoirement par chacune de ces étapes afin de parvenir à la dernière.
Les petits enfants = les débuts de la vie chrétienne
La vie chrétienne commence par le pardon des péchés. Voilà pourquoi l’apôtre Jean, en s’adressant aux petits enfants, leur dit au verset 12 : « vos péchés vous sont pardonnés à cause de son nom ». Leurs péchés sont pardonnés, parce que Jésus-Christ a donné sa vie pour eux, il a pris leurs péchés sur lui. Ces croyants ont confessé le nom de Jésus pour être sauvés, ils ont fait appel au nom du Seigneur, reconnaissant en lui celui qui pardonne : « Seigneur Jésus, sauve-moi ! » En recevant le pardon, ils sont désormais entrés dans une nouvelle relation avec Dieu, qui est ainsi devenu leur Père : « Je vous ai écrit, petits enfants, parce que vous connaissez le Père » (v. 13). Ils sont donc nés de nouveau et font partie de la famille de Dieu (Éphésiens 2.19) ; Dieu a envoyé dans leur cœur l’Esprit saint, qui fait jaillir de leur cœur ce cri : « Abba ! Père ! » (Galates 4.6). Cette première étape est pleine d’émerveillement ! Les petits enfants qui viennent au monde sont fascinés par tout ce qui les entoure, car ils le découvrent petit à petit. Ainsi, les nouveau-nés qui entrent dans le royaume de Dieu s’ébahissent de tant de splendeurs, propres au monde de Dieu. Leur cœur est gonflé de l’amour de leur Seigneur ; leur joie est toute charmante de spontanéité et de candeur ; leur soif de Dieu est insatiable.
Tout cela ne doit pas disparaître ou être abandonné, mais doit plutôt être acquis et constituer le socle sur lequel construire, par lequel se développer. Car aussi charmante soit cette étape, la vie chrétienne ne doit pas s’y figer.
Les jeunes gens = les chrétiens en chemin vers la maturité
En effet, les petits enfants ne doivent pas le rester, mais progresser sur le chemin de la foi pour devenir des jeunes gens, c’est-à-dire des chrétiens en chemin vers la maturité. Ainsi l’apôtre de Christ s’adresse à ce deuxième groupe de chrétiens, au verset 13 : « Je vous écris, jeunes gens, parce que vous avez vaincu le mauvais ».
Ces jeunes gens ne sont pas seulement délivrés de la peine du péché, mais aussi de la puissance du péché. Ils savent assurément que leurs péchés leur ont été pardonnés ; ils sont maintenant au stade du triomphe sur le péché. En langage doctrinal, ces croyants n’en sont plus au stade de la justification par la foi, mais de la sanctification. Ils sont entrés en lutte contre le mal et ne se laissent plus dominer par lui. Parce que leur foi a grandi, ils ne se contentent pas de croire que Christ est mort pour leurs péchés, ils savent aussi que Jésus a vaincu le péché pour eux. Par lui, ils sont vainqueurs. Et pourquoi ont-ils vaincu le malin ? Parce qu’ils sont forts : « Je vous ai écrit, jeunes gens, parce que vous êtes forts, que la parole de Dieu demeure en vous et que vous avez vaincu le mauvais » (v. 14). Ce n’est pas que leur force leur vienne d’eux-mêmes ; ils sont forts parce que le Christ les fortifie, c’est la Parole de Dieu qui demeure en eux qui leur communique puissance et victoire. Elle est l’épée de l’Esprit saint par laquelle ils se défendent contre les assauts du mauvais. Les chrétiens qui sont donc à cette deuxième étape de leur développement spirituel savent recourir à la Parole, comme le Seigneur Jésus, lorsqu’ils sont tentés par l’ennemi. À l’exemple du Seigneur qui répondait aux suggestions de Satan par des citations de la Parole de Dieu, eux aussi se défendent en s’appuyant sur la Parole de Dieu. Cette capacité est acquise par une fréquentation assidue de la Parole qui est ruminée, méditée et assimilée pour devenir ce qui oriente les choix de vie et forme la vision du monde. Cette Parole demeure en eux, dans le sens où ils l’ont intégrée pour qu’elle renouvelle leur intelligence, et les ouvre sur la réalité de l’Esprit saint. Elle fait partie d’eux ; elle est vivante en eux. Vous voyez, c’est lorsque la Parole de Dieu demeure en nous et nous aide à dire non aux tentations, que nous sommes vraiment en route vers la maturité. Rappelons-nous cette parole du Seigneur : « Comment le jeune homme rendra-t-il pur son sentier ? En se conformant à ta parole » (Psaumes 119.9).
Les pères = les chrétiens matures
Les enfants évoquent les débuts de la vie chrétienne, les jeunes gens symbolisent tous les chrétiens en chemin vers la maturité… Et les pères alors ? Bien sûr, les pères, ce sont les chrétiens matures. Ils sont la dernière étape du développement normal de la vie chrétienne : ils représentent l’âge de la maturité et de la stabilité dans la foi. Il est évident que ce stade s’enrichit des étapes précédentes. Et vu tout ce qu’offre la deuxième étape, nous pourrions nous dire : « N’est-ce pas déjà fabuleux ? Pardon des péchés, connaissance du Père comme celui qui nous a engendrés à une vie nouvelle, triomphe du mal et de Satan, enracinement dans la Parole de Dieu, marche et vie à la lumière de la Parole… ». Mais que manque-t-il à ces jeunes gens pour être des adultes ou être matures dans la foi ? Quelle chose supplémentaire leur faudrait-il pour avoir ce qu’ils n’ont pas encore ? Lisons le verset 12 pour avoir la réponse : « Je vous écris, pères, parce que vous connaissez celui qui est dès le commencement ». Quand il s’adresse pour la deuxième fois aux petits enfants et aux jeunes gens, Jean ajoute de nouveaux éléments, comme pour signifier justement le besoin de développement. Mais, en s’adressant aux pères, Jean répète exactement les mêmes paroles qu’au verset 14 : « Je vous ai écrit, pères, parce que vous connaissez celui qui est dès le commencement ». Seul change le temps du premier verbe. Par ces mots, Jean nous renvoie vers les premières lignes de sa lettre :
Ce qui était dès le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché concernant la parole de la vie, nous vous l’annonçons.
1 Jean 1.1
Trois années passées avec Jésus
Dans ce verset, Jean nous parle des trois années qu’il a passées, lui et les autres disciples, auprès de Jésus. Ils ont marché avec lui, ils l’ont entendu, ils l’ont vu, ils l’ont contemplé et touché de leurs mains. N’allons pas croire que l’apôtre nous parle seulement de proximité physique ; non, dans ce début de sa lettre, Jean évoque surtout la proximité et l’intimité spirituelles que les disciples avaient avec le Seigneur. Leurs oreilles ont entendu des paroles ineffables ; leurs yeux ont vu la gloire du Fils de Dieu ; ils ont touché non un corps humain, mais le corps dans lequel habite toute la plénitude de la divinité (Colossiens 2.9). Jean a reposé sa tête sur le sein de Jésus, le Fils de Dieu, qui était dans le sein du Père (Jean 1.18 – NEG). Il s’agit donc de communion avec le Père et avec le Fils par l’Esprit saint. Il ne s’agit pas seulement d’un homme, Jésus, mais de celui qui était dès le commencement. Ainsi, c’est avec le divin, avec le Seigneur, avec le glorieux, avec la vie même qu’ils étaient en communion. Ils le connaissaient dans sa personne.
Devenir comme lui
À force d’être avec lui, les apôtres sont devenus comme lui. C’est l’étape suprême, ce pour quoi Dieu œuvre dans notre vie ; c’est le but et la volonté de Dieu pour nous tous que nous soyons comme son Fils, à force d’être avec lui, car il nous a « prédestinés à devenir conformes à l’image de son Fils, afin que celui-ci soit le premier-né d’un grand nombre de frères » (Romains 8.29). C’est cela le bien pour lequel Dieu fait travailler toutes les choses.
Les pères, c’est-à-dire les chrétiens matures, connaissent donc « celui qui est dès le commencement », c’est-à-dire qu’ils connaissent d’une connaissance toute spirituelle, toute intime, toute profonde, le Seigneur Jésus dans son humanité, mais aussi dans son éternité, dans sa divinité. Le chrétien mature, c’est celui qui a contemplé de ses yeux, ceux du cœur, et touché de ses mains, celles de la foi. Il ne connaît pas seulement la force du Seigneur et sa victoire, mais il connaît sa personne. Le chrétien mature a dépassé le besoin de se sentir fort, chose propre à la jeunesse ; il l’est de toute façon. Il a dépassé le besoin de demeurer seulement dans la Parole écrite ; il demeure maintenant aussi dans la Parole vivante, dans le Fils et dans le Père. Le chrétien mature s’identifie avec le Christ et connaît la puissance de sa résurrection, son triomphe donc sur la mort, sur Satan, sur le mal. Mais, plus encore, il connaît le Christ parce qu’il partage ses souffrances. Tout ce qui lui importe, c’est l’excellence de la connaissance de Christ :
Ainsi je connaîtrai Christ, la puissance de sa résurrection et la communion à ses souffrances en devenant conforme à lui dans sa mort pour parvenir, d’une manière ou d’une autre, à la résurrection des morts.
Philippiens 3.10-11
Il est mort, crucifié comme le Christ. Il est crucifié avec le Christ ; il vit, mais ce n’est plus lui qui vit, c’est Christ qui vit en lui (Galates 2.20). À force d’être en sa présence, il finit par être comme lui : « Nous tous qui, sans voile sur le visage, contemplons comme dans un miroir la gloire du Seigneur, nous sommes transformés à son image, de gloire en gloire, par l’Esprit du Seigneur » (2 Corinthiens 3.18).
(voir les stades anormaux : le chrétien charnel et le chrétien rétrograde dans la partie de 2 de l’article).
Tendons vers la maturité
Il y a des vérités profondes, difficiles à saisir du premier coup et qui demandent donc de l’attention et des efforts. Le but n’est pas de se faire une grosse tête, mais un cœur obéissant, qui sait faire la différence entre le bien et le mal. « Tendons vers la maturité », c’est-à-dire vers l’intelligence du sacrifice du Christ, sa place et son rôle au ciel, sa médiation, sa souveraine prêtrise : c’est l’invitation pressante que Dieu adresse à tout chrétien. Le début de la vie chrétienne se caractérise par un enseignement des rudiments de la Parole de Dieu, un enseignement excellent en soi, mais qui doit être dépassé. Nous sommes appelés à dépasser l’enseignement élémentaire pour rechercher la nourriture solide qui fera de nous des chrétiens matures. Ce dernier stade est le degré normal d’aboutissement de tout chrétien qui a un certain nombre d’années de vie chrétienne. Or, ce stade ne peut être atteint sans un réel approfondissement des vérités spirituelles. Malheureusement, la tendance aujourd’hui est à la négligence de la connaissance, voire au refus des enseignements approfondis. Cette position ne peut que produire des nains spirituels. « Surtout pas de doctrine ! » disent certains. Mais affirmer cela, c’est dire que nous n’avons pas besoin d’enseignement. Or, justement, l’auteur lie étroitement enseignement approfondi et développement spirituel ou vérités ardues et croissance dans la foi. Il est urgent de voir le lien entre nourriture solide et maturité, entre connaissance de Dieu et croissance.
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