Discussion avec Tim Keller – « Une espérance en ces temps troublés » (partie 4/4)


Timothy Keller, pour la radio Signpost. Vous pouvez consulter ici la version originale, en anglais, disponible à l’écrit et en audio.

Être régénéré ? Le scepticisme face à la foi ; la raison et l’expérience… Être un chrétien troublé ?

PARTIE 4 : Quel avenir pour l’église ? Comment l’affronter ?

L’église sera beaucoup plus multiethnique et beaucoup plus orthodoxe.

Moore : Quand on parle de peur, l’une des choses qui revient, bien sûr, c’est la peur culturelle. Et je suis sûr que tu as vu hier l’enquête publiée par Gallup qui montre que, pour la première fois dans les sondages, l’adhésion à l’église est inférieure à 50 % du public américain ; ou encore, que dans n’importe quel lieu de culte, l’adhésion est tombée à 47 %. Et ça représente une chute spectaculaire sur plus de 20 ans. Les choses semblent s’effondrer pour beaucoup de chrétiens lorsqu’ils regardent cela. Si tu devais « prédire » en quelque sorte, où va-t-on en termes de sécularisation et à quoi ressemblera l’église en Amérique, on va dire, dans 20 ans ? Bien sûr, tu n’es pas medium, on le sait bien. Mais qu’est-ce que tu vois se profiler ?

 

Keller : Ok, tu sais quoi, j’ai vraiment l’impression que tu devrais faire venir Ross Douthat ou quelqu’un comme ça pour parler de l’avenir de l’Eglise catholique. Je ne me sens pas capable de parler d’eux, alors qu’ils représentent une partie importante. Tu sais, quand on parle du christianisme en Amérique, désolé, ils en représentent une grande partie. Mais en ce qui concerne le protestantisme, voilà ce que je pense qu’il va se passer dans les 20 ou 30 prochaines années.

Tout d’abord, le nombre de croyants de nom ; c’est-à-dire des personnes qui croient et font partie d’églises, principalement par pression ou avantage culturel et social. C’est comme ça qu’un très grand nombre de personnes dans ce pays ont fait partie de l’église. En d’autres termes, il y avait soit une pression sociale, soit un avantage social à faire partie de l’église, soit de la tradition familiale. Ce qui se passe, c’est qu’il y a de plus en plus de croyants de nom, et ils sont en train de se retirer. Et nous allons arriver à des gens pour qui, fondamentalement, la religion n’est pas héritée mais choisie et réfléchie. Maintenant, quand on arrive à ce groupe, il peut y avoir un taux de déperdition là aussi, mais il y a beaucoup plus de rétention. Donc, par exemple, une famille méthodiste de nom qui va à l’église méthodiste de temps en temps et qui a été historiquement méthodiste, mais dans laquelle personne n’est vraiment engagé dans leurs croyances. Eh bien, l’idée que les enfants grandissent et disent « je ne suis pas méthodiste, je ne suis pas chrétien » ; les chances sont très élevées. Donc le taux de rétention d’un chrétien de nom n’est pas très élevé. Le taux de rétention d’enfants de personnes plus conservatrices et orthodoxes est beaucoup, beaucoup, beaucoup plus élevé. Donc, déjà, ça se ressert.

Deuxièmement, les blancs sont beaucoup plus laïques et individualistes que les non-blancs. Les non-blancs sont plus religieux et ils sont plus communautaires ou collectifs. En plus, les taux de natalité des non-blancs sont plus bas, l’immigration va arriver et on va assister à, je pense, un rétrécissement de l’église jusqu’à… je ne sais pas où elle en sera. Ça pourrait être jusqu’à 20 ou 30 %. Et ensuite, elle recommencera à croître. Elle sera beaucoup plus multiethnique et beaucoup plus orthodoxe.

Quand j’étais jeune, il y avait tout un pan d’évangéliques conservateurs. La majorité des gens qui allaient à l’église étaient des protestants traditionnels. Ces protestants traditionnels vont constituer la minorité, alors que la majorité des gens seront évangéliques ou pentecôtistes ou quelque chose comme ça, et il y aura au moins plus de la moitié de non-blancs. À mon avis, si la population est, on va dire, à 50 % blanche dans 20 ans (ou à 45 % blanche), l’Église sera plutôt composée de 60 ou 70 % de non-blancs et de 30 % de blancs. C’est comme ça à New York. Si vous voulez voir à New York, on a implanté des églises. C’est-à-dire que, littéralement, les évangéliques de la ville de New York sont passés d’une centaine d’églises à plus de deux cent cinquante églises dans la partie centrale au cours des vingt-cinq dernières années, ce qui est étonnant. Mais probablement pas plus d’un tiers des personnes dans ces églises sont blanches. Donc, je pense que ce que je vois à New York sera l’avenir ici. Vous allez rétrécir. Vous ne verrez pas 75 %, 50 % de membres d’église ou de fréquentation d’église et ce genre de choses. Mais ça va descendre à 25 ou 35 %. Et puis, en grande partie, ça recommencera à croître. La sécularisation va atteindre son point le plus bas d’ici 20 ou 30 ans. L’Islam va croître également. Et tout ça pour de nombreuses raisons. Je ne sais pas si tu trouves ça intéressant…

 

Moore : Oui. Mais avec ce constat inévitable que tout se sécularise, l’avenir est désenchanté.

 

Keller : Non, non, non. En fait, je veux dire, demande à n’importe quel spécialiste de la démographie, le monde va au contraire devenir moins séculaire au fil du temps. C’est en rapport avec le taux de natalité, ce genre de facteurs. Mais aussi avec l’évangélisation, tu sais, et d’autres choses comme ça.

Nous ne parlons pas seulement de personnes ressuscitées. C’est là que le christianisme est unique : nous parlons d’un monde ressuscité.

Moore : Si tu devais donner un conseil à un chrétien de 22 ans qui a un peu peur, qui est un peu nerveux à propos de l’avenir… J’ai mentionné un peu plus tôt à quel point j’avais été surpris par tous les jeunes de 21/22 ans qui avaient été interpellé par l’article de The Atlantic. Et si tu devais leur dire « voilà une chose sur laquelle vous devriez vraiment vous concentrer pour aller de l’avant », que leur conseillerais-tu ?

 

Keller : Eh bien, tu sais quoi, pendant tout ce podcast, j’ai en quelque sorte esquivé toutes tes questions en répondant que c’était au cas par cas. Je ne sais pas si je peux vraiment le faire pour cette fois. Bon, ok, laisse-moi juste te raconter quelque chose dont Kathy et moi avons discuté l’année dernière. Si Jésus-Christ a réellement été ressuscité des morts, s’il s’est vraiment levé, est sorti, a été vu par des centaines de personnes, leur a parlé. S’il a été ressuscité des morts, alors tu sais quoi ? Tout va s’arranger. Peu importe ce qui t’inquiète en ce moment, ce qui t’effraie, tout va en fait s’arranger. Parce que tu dois te rappeler que nous ne parlons pas seulement de personnes ressuscitées. Jésus Christ est, et c’est là que le christianisme est unique, nous parlons d’un monde ressuscité. Il y a beaucoup d’autres religions qui parlent d’une vie future après la mort, mais dans un monde immatériel. En d’autres termes, tu obtiens une sorte de consolation pour le monde que nous avons perdu. Le christianisme dit qu’il ne s’agit pas seulement de ressusciter nos corps, mais que le monde sera en fait un monde matériel purifié de tout mal, de toute souffrance et de tout péché. Si Jésus-Christ a été ressuscité des morts, alors le monde entier sera, en un sens, ressuscité et tout ira bien. Tout. On ne sait pas comment. Je ne sais pas comment, mais ça ira. Donc, et tu sais quoi ? En fait, en ce moment même, je ne pourrais pas être convaincu que Jésus n’a pas été ressuscité des morts, que ce soit intellectuellement ou existentiellement. Donc à chaque fois… et en fait, Kathy et moi, eh bien écoute, on pleure. On a beaucoup pleuré hier soir. Parfois, on est submergé par la réalité de la brièveté de ce qu’il nous reste ici-bas. Et on était juste en train de pleurer ensemble, et de pleurer, pleurer. Et puis on se rappelle que si Jésus-Christ est ressuscité des morts, tout va bien se passer. Et alors, tu as beau essuyer tes larmes, tu n’arrêtes pas de pleurer. C’est comme du sel dans une plaie, qui empêche la plaie de s’infecter. Ça empêche la plaie de s’infecter. Mais ça ne veut pas dire que, jusqu’à la fin… Tu vois, jusqu’à ce qu’on rencontre Jésus-Christ, on aura toujours nos blessures. Elles vont être guéries, mais elles seront guéries par lui. Donc, je pense que là encore… oui, je reviendrais encore à l’idée que si Jésus-Christ est ressuscité des morts – et qu’il est – alors tout ira bien.

 

Moore : Eh bien, c’est un bon mot pour terminer. Le livre s’appelle Une espérance en ces temps troublés de Tim Keller. Et je suis vraiment reconnaissant pour toi, Tim, et pour la façon dont Dieu t’utilise dans ma vie. Et j’encourage tout le monde à lire ce livre Une espérance en ces temps troublés. Merci d’être avec nous aujourd’hui.

 

Keller : C’était formidable d’être avec toi, Russ.

 

Moore : Et je vous encourage, si vous voulez plus d’informations sur ce livre ou d’autres ressources, à cliquer sur la couverture en bas. Il y aura des notes d’émission à ce sujet. N’oubliez pas non plus de m’envoyer les questions éthiques qui vous préoccupent, peut-être dans votre famille ou votre église, et nous y répondrons sur le podcast solo. Et n’oubliez pas d’envoyer ce message à quelqu’un qui pourrait en bénéficier. C’était Russell Moore et vous écoutez Signposts.

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Auteur de l’article : Éditions Clé

Éditions Clé

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