«L’ascension de Christ et l’émerveillement des premiers chrétiens» extrait du livre de Philippe Viguier publié aux Éditions Clé


L’ascension de Christ et l’émerveillement des premiers chrétiens

Et tous le reconnaissent, le mystère de la piété est grand : Dieu est apparu comme un homme, sa justice a été révélée par l’Esprit, il a été vu des anges, proclamé parmi les nations, on a cru en lui dans le monde, il a été élevé dans la gloire.

1 Timothée 3.16

S’émerveiller de la gloire de Dieu dans l’ascension

« Il a été élevé dans la gloire » : l’ascension est une doctrine intrinsèquement liée à la gloire de Dieu, qui nous plonge dans l’étude de cette gloire, avec tout l’émerveillement que cela génère. L’ascension n’est pas juste une date, un événement ou un miracle. C’est une facette unique de ce diamant qu’est la gloire de Dieu, une facette à découvrir, à admirer, à chérir.

Jésus a été élevé dans la gloire. Cette vérité glorieuse, si nous la méditons, nous fera mieux connaître notre Messie et nous révélera aussi ô combien son ascension nous dépasse, pour nous tirer éternellement vers le haut.

À cause de l’humanité de Christ, nous pouvons avoir tendance à minimiser sa gloire dans notre manière de penser à lui. L’ascension nous rappelle que Jésus est glorieux, élevé, tout-puissant, même s’il s’est revêtu d’un corps humain. Paul insiste : « Ainsi, désormais, nous ne percevons plus personne de manière humaine ; et si nous avons connu Christ de manière purement humaine, maintenant nous ne le connaissons plus ainsi » (2Co 5.16). Henry Swete avertit : « Notre enthousiasme, éveillé pour reconstruire un portrait historique de Jésus, nous fait payer un prix trop élevé si notre attention à ce sujet nous écarte du Christ glorifié dont la suite du Nouveau Testament témoigne[1] ».

La gloire de l’ascension est unique dans le ministère de Jésus. Jusqu’à sa mort, de nombreuses manifestations de sa gloire sont cachées. Ce qui se produit après la prière de Jean 17 est absolument unique : « Révèle la gloire de ton Fils afin que ton Fils [aussi] révèle ta gloire » (Jn 17.1). La fin du ministère de Jésus – sa mort, sa résurrection et son ascension – ôte le voile et donne un incroyable avant-goût du ciel.

Par son ascension, Jésus est monté plus haut que nous ne pouvons l’imaginer pour prendre une place plus glorieuse que nous ne pouvons le concevoir. Puisse cet ouvrage diriger nos regards vers le haut dans une admiration profonde de la gloire du Seigneur et Sauveur Jésus-Christ !

Un des premiers chants des premiers chrétiens

« Il a été élevé dans la gloire » (1 Tim 3.16) est la conclusion d’une strophe et le point culminant de ce que les commentateurs décrivent comme étant un « hymne christologique » de l’Église primitive[2].

Ces vers en prose sur l’ascension sont ainsi les paroles d’un des premiers cantiques chrétiens[3]. Dès sa naissance, l’Église primitive a proclamé son émerveillement face à cette montée au ciel unique et glorieuse de Jésus-Christ.

En tant que pasteur et responsable de la louange dans notre assemblée, je suis très sensible aux paroles des chants que nous utilisons lorsque nous nous réunissons. « Nous sommes ce que nous chantons », écrit l’historien Mark Noll[4]. En effet, nous chantons la doctrine qui nous inspire, et en retour, celle-ci influence notre vie.

Alors pourquoi l’Église primitive chante-t-elle l’ascension de Jésus-Christ ?

Peu de pratiques unissent autant l’Église que les chants qu’elle entonne ou les Credo qu’elle récite. Le chant est notre mémoire commune, notre expérience commune, notre théologie commune, notre proclamation commune. Et quelles belles paroles que ces vers cités par Paul ! L’Église primitive est unie autour de Christ exalté, lui qui est « proclamé parmi les nations », en qui l’« on a cru […] dans le monde ». Ce Messie, qui a vécu une ascension devant les apôtres, est la fierté de son peuple, sa gloire. Cet événement inspire un changement de vie, vers la gloire, ainsi que la proclamation dans le monde entier du Christ qui le mérite, qui est digne d’être connu, adoré, reconnu pour cette renommée qui est sienne.

Paul cite cet extrait de cantique en 1 Timothée 3.16, en conclusion d’un enseignement sur les qualifications des anciens, les responsables spirituels de l’Église, et des diacres, les serviteurs exemplaires de l’Église. Paul vise les plus hauts responsables du corps de Christ, dont le standard est inspiré par… l’ascension de Jésus-Christ ! Les anciens et les diacres incarnent un caractère spirituel exemplaire qui tire l’Église entière vers le haut, tout comme la résurrection de Christ culminant dans son ascension nous tire vers le haut.

L’émerveillement des premiers chrétiens devant cette montée au ciel de Jésus ne s’arrête pas à une méditation cérébrale ; elle inspire directement la conduite de l’Église locale et la proclamation par la mission et l’évangélisation. C’est puissant ! Très rapidement, l’ascension de Jésus-Christ inspire les arts, la poésie, la louange : nous avons peu d’exemples de chants écrits par les premiers chrétiens, mais nous savons avec certitude que l’ascension faisait partie de leur répertoire. Certains théologiens décrivent le texte de Paul en Philippiens 2.5-10 comme étant un autre cantique de l’Église primitive, d’autres comme étant simplement un texte de Paul magnifiquement poétique[5]. Ces vers portent nos émotions au point culminant de l’ascension de Jésus-Christ :

Que votre attitude soit identique à celle de Jésus-Christ :

lui qui est de condition divine, il n’a pas regardé son égalité avec Dieu comme un butin à préserver, mais il s’est dépouillé lui-même en prenant une condition de serviteur, en devenant semblable aux êtres humains.
Reconnu comme un simple homme, il s’est humilié lui-même en faisant preuve d’obéissance jusqu’à la mort, même la mort sur la croix.
C’est aussi pourquoi Dieu l’a élevé à la plus haute place et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom afin qu’au nom de Jésus chacun plie le genou dans le ciel, sur la terre et sous la terre et que toute langue reconnaisse que Jésus-Christ est le Seigneur, à la gloire de Dieu le Père.

Philippiens 2.5-11

L’ascension est une doctrine qui présente à la fois une grande richesse théologique et de nombreuses applications pratiques. Dans ces quelques vers de 1 Timothée 3, nous voyons un mouvement de descente, « Dieu est apparu comme un homme », puis de montée, « il a été élevé dans la gloire ». Il y a un parallélisme entre la descente de la divinité sur terre (incarnation) et la montée de l’humanité au ciel (ascension), qui constitue ce « mystère de la piété [qui] est grand ».

Nous avons en effet de quoi être émerveillés par le grand mystère de la foi. L’incarnation comme l’ascension sont difficiles à sonder, à comprendre, à expliquer avec les bons mots. Ce sont des événements improbables qui ont pourtant bouleversé toute l’histoire de l’humanité.

Wayne Grudem décrit son émerveillement face à l’incarnation, Jésus pleinement homme et pleinement Dieu :

C’est de loin le miracle le plus extraordinaire de toute la Bible – bien plus extraordinaire que la résurrection et même que la création de l’univers. Le fait que le Fils de Dieu infini, omnipotent et éternel ait pu devenir homme et revêtir une nature humaine pour toujours, de sorte que le Dieu infini est devenu une seule personne avec l’homme fini, restera pour l’éternité le plus grand miracle et le mystère le plus profond de tout l’univers[6].

Wayne Grudem, Théologie systématique, 2e éd., Charols : Excelsis, 2023, p. 793.

Nous pouvons être d’accord ou non avec Grudem quand il affirme que l’incarnation est le plus grand miracle. Mais ce mystère du Fils 100 % homme et 100 % Dieu est en effet un des nœuds théologiques les plus complexes à expliquer[7]. L’ascension de Christ, d’une certaine manière, réfléchit comme un miroir l’ampleur de sa descente. Cette montée de Christ, qu’il entreprend pour toute l’humanité en tant que Dieu-homme, est tout aussi improbable et merveilleuse que cette descente, ce mystère incroyable de Dieu devenu homme. Noël et l’Ascension sont deux fêtes qui se complètent, elles célèbrent le même voyage, l’une dans un sens, l’autre dans le sens opposé.

Un tournant dans la vie des apôtres

La découverte de ce chant dans 1 Timothée concernant l’ascension m’a bouleversé, tout comme l’étude du livre des Actes pour mes prédications dans mon assemblée. Je dois avouer qu’avant de creuser les Actes des Apôtres, je ne voyais dans l’ascension guère plus qu’un beau miracle, sans grande conséquence théologique ou pratique. Prêcher verset par verset sur le livre des Actes m’a montré que l’ascension était non seulement une introduction à l’œuvre de l’Église et la mission, mais aussi un fondement.

Le départ de Jésus marque un tournant fort dans l’attitude et la foi des disciples. Pour les apôtres, il y a un avant et un après l’ascension. Les apôtres des Évangiles et les apôtres des Actes ne sont simplement pas les mêmes en termes de conviction et de ministère. Nous ne pouvons pas minimiser l’impact de l’ascension sur les apôtres et les premiers chrétiens. Jusqu’aux derniers moments de la vie de Jésus sur terre, les disciples ont encore des doutes : « Les onze disciples allèrent en Galilée, sur la montagne que Jésus leur avait désignée. Quand ils le virent, ils se prosternèrent devant lui, mais quelques-uns eurent des doutes » (Mt 28.16-17). Malgré la résurrection, les disciples luttent et Jésus continue à les encourager : « Après avoir souffert, il se présenta à eux vivant et leur en donna de nombreuses preuves : pendant 40 jours, il se montra à eux et parla de ce qui concerne le royaume de Dieu » (Ac 1.3). À la fin des Évangiles, les apôtres sont encore confus en ce qui concerne l’identité de Christ et sa divinité, ils ont besoin de nombreuses preuves. Après l’ascension et la Pentecôte, les doutes se sont évanouis. Les disciples prennent une direction claire pour proclamer le Christ et construire son Église.

Le contraste entre les apôtres des Évangiles et les apôtres du livre des Actes est percutant. À la fin de l’Évangile de Jean, Pierre abandonne le ministère pour repartir à la pêche. Dans le livre des Actes, il se donne entier à l’œuvre de Christ. Lors du dernier repas de Jésus, les apôtres se battent pour savoir qui est le plus grand. Dans le livre des Actes, ils se battent pour proclamer que Christ est le plus grand. Leur parcours alors semé de doutes et de crainte fait place au courage et à la foi. Alors que, dans le jardin de Gethsémané, ils luttent pour prier, la première chose qu’ils font en se réunissant après l’ascension est de se consacrer à la prière (Ac 1.14). La transformation des disciples est profonde, mais il ne s’agit pas simplement d’un long chemin de croissance vers la maturité : au moment de l’ascension, un tournant puissant se produit dans leurs vies.

Le départ de Jésus marque probablement la transition la plus importante de l’histoire de l’humanité : il s’agit du moment où Dieu fait homme part et où la relève est laissée entre les mains d’une poignée d’anciens pêcheurs. Cette transition si improbable est pourtant un succès incroyable. Cette ascension est soudaine, puissante et mystérieuse, au point que Gérald Bray affirme : « L’ascension de Jésus-Christ, quarante jours après sa résurrection, est l’événement le plus inexplicable de la Bible[8] ».

Ébahi par mon étude dans le livre des Actes, je ne pouvais que me poser à moi-même cette question : si cet événement a produit un tel impact dans la vie des disciples, qu’en est-il pour moi ? Si ce départ de Jésus dans la gloire a produit un impact profond et a façonné l’émergence de l’âge du salut par l’Église et la mission, qu’en est-il pour nous aujourd’hui ? Se pourrait-il que je sois aussi encouragé dans ma foi, dans mon courage, dans mon zèle, dans ma proclamation de Christ, dans mon adoration en creusant cet événement, cette belle doctrine ? Mon étude du sujet a dépassé toutes mes attentes.

La dernière impression

Que vous vient-il à l’esprit lorsque vous pensez à Jésus ? Comment l’imaginez-vous ?

Lorsque nous pensons à une personne que nous avons connue, c’est souvent la dernière impression qui nous vient en mémoire. Quand je pars en voyage et que mes enfants me manquent, ce n’est pas l’image de leur naissance qui me revient en tête, mais le dernier câlin d’au revoir. En pensant à mon épouse, ce n’est pas notre première conversation qui me revient à l’esprit, mais nos derniers échanges. Quand je pense aux amis proches qui sont partis rejoindre le Seigneur, ce sont surtout les dernières paroles échangées avec elles qui ont laissé la plus forte empreinte.

La projection mentale que nous faisons de quelqu’un dirige notre perception et nos émotions. La dernière impression y joue un rôle incontournable.

Quelle image de Jésus vous vient à l’esprit quand vous pensez à lui ?

  • Pour certains, c’est un bébé né dans une crèche. Pour beaucoup, c’est l’image d’un enseignant qui parcourt, sandales aux pieds, un pays antique. Pour d’autres, c’est un corps languissant sur une croix.
  • Peut-être l’imaginez-vous en train de faire un de ses nombreux miracles, marcher sur l’eau, multiplier les pains et les poissons, calmer la tempête.
  • Peut-être un dessin d’un livre pour enfants vous revient-il en mémoire. L’image de Jésus entouré d’enfants, avec un petit sur ses genoux, me revient souvent à l’esprit, ainsi que celle où il ramène une brebis perdue.
  • Peut-être est-ce l’image d’un film, où il enseigne les foules, fait face aux pharisiens ou crie de douleur sur la croix.

De nombreuses images se gravèrent dans l’esprit des disciples qui vécurent avec lui. Mais rien ne pourra remplacer la dernière impression qu’ils eurent de lui : Jésus élevé, Jésus exalté, Jésus couronné de gloire.

Cette dernière impression glorieuse laissée par Jésus anticipe un retour rempli de gloire et de majesté. Alors que la littérature, les médias et la culture rivalisent pour projeter une image de Christ toujours plus rabaissante, les croyants sont appelés à rejoindre les disciples en gravant dans leur esprit une vision glorieuse de Jésus élevé dans la gloire et assis à la droite du Père.

C’est avec cette image en tête qu’ils partent prêcher l’Évangile, former des disciples, implanter des Églises, conquérir le monde. Pour Justin Martyr (100–165 apr. J.-C.), l’ascension est le tremplin qui transforme les disciples d’étudiants de Dieu en véritables acteurs et proclamateurs de l’Évangile :

En effet, lorsqu’il fut crucifié, tous ses disciples l’abandonnèrent et le renièrent. Plus tard, il ressuscita des morts, et se montrant à eux, il leur apprit les prophéties qui annonçaient toutes ces choses et ils le virent remonter au ciel. Pleins de foi et revêtus de la force d’en haut, qu’il leur avait envoyée, ils s’en allèrent à travers le monde, pour instruire les hommes, et on les appela apôtres[9].

L’ascension comme la grande charnière

En suivant le livre des Actes, nous découvrons que l’impact de l’ascension ne s’arrête pas aux onze apôtres présents. L’ascension est au centre d’une longue série de nouveaux commencements.

Nous avons mentionné l’un des premiers chants de l’Église primitive. Observez la conclusion de la première prédication de Pierre le jour de la Pentecôte :

« C’est ce Jésus que Dieu a ressuscité, nous en sommes tous témoins. Élevé à la droite de Dieu, il a reçu du Père le Saint-Esprit qui avait été promis et il l’a déversé, comme vous le voyez et l’entendez maintenant. David en effet n’est pas monté au ciel, mais il dit lui-même : Le Seigneur a dit à mon Seigneur : “Assieds-toi à ma droite jusqu’à ce que j’aie fait de tes ennemis ton marchepied.” Que toute la communauté d’Israël sache donc avec certitude que Dieu a fait Seigneur et Messie ce Jésus que vous avez crucifié. »

Actes 2.32-36

Dès son premier discours, Pierre place l’ascension dans un mouvement englobant la résurrection, la montée au ciel, l’exaltation[10], la session[11] et l’envoi du Saint-Esprit : les implications théologiques et pratiques de cette doctrine sont si riches ! La prédication de Christ élevé dans la gloire est puissante : 3000 personnes se convertissent (Ac 2.41) ! Cette doctrine si rapidement oubliée de nos jours a marqué un tournant dans l’engagement de la foi des disciples ainsi que des non-croyants qui se sont tournés vers Christ. Le jour de la Pentecôte, l’Église se construit sur une prédication culminant avec l’ascension de Christ.

L’ascension est aussi une source de motivation pour Étienne qui est allé jusqu’au bout de son engagement chrétien malgré la colère de ceux qui en feront le premier martyr de l’Église :

En entendant ces paroles, ils avaient le cœur plein de rage et ils grinçaient des dents contre lui. Mais Étienne, rempli du Saint-Esprit, fixa les regards vers le ciel et vit la gloire de Dieu et Jésus debout à la droite de Dieu. Il dit : « Je vois le ciel ouvert et le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu. » Ils poussèrent alors de grands cris en se bouchant les oreilles, se précipitèrent tous ensemble sur lui, le traînèrent à l’extérieur de la ville et se mirent à le lapider. Les témoins avaient déposé leurs vêtements aux pieds d’un jeune homme appelé Saul.

Actes 7.54-58

Bruce Waltke résume cela ainsi : « La vision du Christ dans son ascension incite Étienne à la fidélité, même jusqu’à la mort[12] ». Étienne n’était probablement pas présent lors de l’ascension de Jésus-Christ. Pourtant, cette vision de Christ élevé est celle qui l’inspire dans ses derniers moments. À la vue de Christ élevé au rang dont il est digne, dans sa gloire, Étienne n’a plus peur de rien. Il est prêt à mourir en proclamant Christ à la droite de Dieu[13].

Quant au premier missionnaire pour les nations, Paul, il se convertit par une lumière venant du ciel (Ac 26.13) et une « vision céleste » (Ac 26.19). L’apôtre Paul, s’il n’est pas avec les onze lors de l’ascension, est changé de manière tout aussi radicale après avoir vu Christ élevé. Sur le chemin de Damas, en un instant, sa perspective du monde est révolutionnée lorsque les cieux s’ouvrent et qu’il voit Christ pour qui il est vraiment. La beauté de cette vision céleste est telle qu’il ne peut y résister (Ac 26.19), et il ne sera plus jamais le même. Cette impression de Christ exalté métamorphose l’homme rebelle et dur au cœur de pierre qu’il était en un apôtre infatigable (1Co 15.10).

Il n’est pas surprenant de noter que le passage le plus cité de l’Ancien Testament est le psaume 110, évocateur de l’ascension et la session du Messie à la droite de Dieu. Ce miracle se distingue des autres miracles de Jésus, car il est de loin le plus cité dans la Bible après la résurrection[14].

Premier chant, première prédication, premier martyr, premier missionnaire, passage le plus cité de l’Ancien Testament…, l’ascension de Christ et ses conséquences jouent un rôle charnière dans le développement du Nouveau Testament. Les premiers chrétiens ont été profondément façonnés par cette ascension. Nous comprenons peut-être mieux pourquoi les Pères de l’Église ont instauré une fête pour se remémorer l’événement. La richesse de leurs discussions sur le sujet montre aussi qu’ils y pensaient beaucoup plus que nous aujourd’hui. Augustin ne cache pas son émerveillement vis-à-vis des conséquences glorieuses de l’ascension pour les croyants :

Notre humanité dont Jésus-Christ a daigné se revêtir fait aujourd’hui son entrée triomphante dans le ciel ; Jésus-Christ ne se contente pas d’avoir sauvé l’homme, il veut encore le glorifier[15].

L’ascension de Christ est et sera aussi la nôtre

L’Église primitive, dans ce cantique, lie l’ascension de Christ à l’identité de l’Église. Parce que Christ a été élevé, l’Église qui le représente doit se comporter avec dignité. Dans l’épître aux Éphésiens, l’apôtre Paul explique que l’ascension de Christ est aussi la nôtre :

Nous qui étions morts en raison de nos fautes, il nous a rendus à la vie avec Christ – c’est par grâce que vous êtes sauvés –, il nous a ressuscités et fait asseoir avec lui dans les lieux célestes, en Jésus-Christ. Il a fait cela afin de montrer dans les temps à venir l’infinie richesse de sa grâce par la bonté qu’il a manifestée envers nous en Jésus-Christ.

Éphésiens 2.5-7

L’identité du croyant est celle d’une personne morte dans la mort de Christ, ressuscitée dans la résurrection de Christ et élevée dans l’ascension de Christ. Ce que Christ a accompli en montant au ciel a des conséquences profondes sur qui nous sommes et sur la manière dont nous sommes appelés à vivre sur terre. N’est-ce pas étonnant en effet que la première chose que les croyants feront dans leur corps ressuscité sera de vivre une ascension ?

En effet, le Seigneur lui-même, à un signal donné, à la voix d’un archange et au son de la trompette de Dieu, descendra du ciel et ceux qui sont morts en Christ ressusciteront d’abord. Ensuite, nous qui serons encore en vie, nous serons tous ensemble enlevés avec eux sur des nuées à la rencontre du Seigneur dans les airs, et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur. Encouragez-vous donc les uns les autres par ces paroles.

1 Thessaloniciens 4.16-18

L’approche de ce livre

Tout comme l’histoire de l’incarnation ne commence pas à Noël, l’histoire de l’ascension de Jésus-Christ ne commence pas 40 jours après sa résurrection. C’est un long parcours de promesses, de symboles, d’attentes concernant le Messie, de puzzles théologiques et prophétiques. Notre approche consistera à considérer l’ascension comme étant à la fois un événement distinct et un élément indissociable de ce mouvement plus large englobant la résurrection, la montée au ciel, l’exaltation, la session et l’envoi du Saint-Esprit.

Dans ce livre, je vous invite à parcourir une série de passages faisant référence à ce mouvement vertical de Jésus-Christ. Comme nous l’avons vu dans le chant cité en 1 Timothée 3.16, les premiers chrétiens comprenaient l’ascension comme étant un miracle, une identité partagée en Christ et un mouvement spirituel vers le haut.

Vous serez peut-être surpris par certains développements et par le choix de certains passages. Plusieurs évoquent des parallèles physiques de montées et de descentes, d’autres des parallèles plus figuratifs de ce mouvement. J’ai la conviction que les deux aspects sont liés. Cette richesse nous permettra d’approfondir des sujets complexes tout en recherchant des implications pratiques.

Mon but avant tout par cet ouvrage est de renouveler en chacun de nous un émerveillement non seulement pour l’ascension, mais surtout pour le Christ de l’ascension. En creusant cette doctrine peu explorée, j’espère vous aider à mieux connaître certaines facettes de ce Sauveur si extraordinaire.

L’essentiel

  • L’ascension de Jésus-Christ révèle un aspect particulier de la gloire de Dieu.
  • L’ascension faisait partie du répertoire de louange de l’Église primitive.
  • L’ascension inspire la conduite de l’Église.
  • L’ascension marque un tournant fort dans l’attitude et la foi des apôtres.
  • L’ascension de Jésus est la dernière image de sa personne gravée dans l’esprit des disciples, celle qu’ils ont portée avec eux en le proclamant dans le monde.
  • L’ascension inspire chez les premiers chrétiens la prédication, l’engagement total même jusqu’à la mort, la repentance et l’élan missionnaire.
  • Il existe un lien entre l’ascension de Christ et notre identité chrétienne.
  • La première chose que les croyants feront dans leur corps glorifié est de vivre une ascension.

[1] Henry Swete, The Ascended Christ, a Study in the Earliest Christian Teaching, Londres: MacMillan and Co, 1910, p. xii.

[2] William D. Mounce, Pastoral Epistles, vol. 46, Word Biblical Commentary, Dallas: Word, 2000, p. 225.

[3] La structure de ces vers semble être la plus claire en termes d’évocation d’un cantique. À comparer avec Colossiens 1.15-20, Philippiens 2.4-9 et 2 Timothée 2.11-13.

[4] Mark Noll, «We are what we sing», Christianity Today, 12 juillet 1999.

[5] Gordon D. Fee, «Philippians 2:5-11: Hymn or Exalted Pauline Prose?», Bulletin for Biblical Research 2, 1992, p. 29-46.

[6] Wayne Grudem, Théologie systématique, 2e éd., Charols : Excelsis, 2023, p. 793.

[7] La citation de Grudem ci-dessus est sa conclusion au sujet des discussions christologiques sur l’union hypostatique, la question de la peccabilité de Christ, la kénose…, tous ces sujets extrêmement complexes qui ont fait verser beaucoup d’encre des Pères de l’Église à nos jours.

[8] Gérald Bray, « L’ascension », La Revue réformée, Sommaire N° 199, 1998/3, Tome XLIX.

[9] Justin Martyr, Première Apologie 50.

[10] Le terme « exaltation » fait référence à la gloire que Jésus reçoit en retournant au ciel.

[11] Le terme « session » se réfère au fait que Christ s’est assis à la droite de Dieu sur le trône divin.

[12] Bruce Waltke, «“He Ascended and Sitteth…” Reflections on the Sixth Article of the Apostles’ Creed», Crux, Juin 1994, vol. 30, p. 4.

[13] La vision d’Étienne est toutefois différente de celle du Messie assis à la droite de Dieu annoncée dans le psaume 110. Christ est debout, comme pour plaider sa cause, pour l’accueillir dans quelques instants, pour montrer son approbation, son amour et aller à sa rencontre.

[14] Voici la liste des passages : Mt 26.64, Mc 16.19, Lu 24.50-53, Jn 1.51 ; Jn 6.38-40, Jn 61-63 ; Jn 7.33 ; Jn 8.14, 21 ; Jn 13.33 ; Jn 14.3, 12, 28 ; Jn 16.5, 7, 10, 17, 28 ; Jn 20.17 ; Ac 1.2, 9, 22 ; Ac 2.32-36 ; Ac 5.31-32 ; Ac 7.55-56 ; Ac 13.37, Rm 8.34, 2Co 5.10, Ep 1.9-10, 20-21 ; Ep 2.4-7 ; Ep 4.8-10, Php 2.9-11, Col 3.1, 1Tim 3.16, Heb 4.14-16 ; Heb 6.19-20 ; Heb 7.26 ; Heb 8.2 ; Heb 9.12, 24 ; Heb 10.12 ; Heb 12.2, 1P 3.21-22, Ap 1.7-8 ; Ap 4.2, 9-11 ; Ap 5.13.

[15] Augustin, Homélie 1040, Sur l’ascension du Sauveur.


Texte copyright ©2024 Éditions Clé et Philippe Viguier. Reproduction interdite sans autorisation écrite.

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Auteur de l’article : Éditions Clé

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